La directive 2010/63 relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques a été transposée en droit français en février 2013. Ce nouveau dispositif, qui remplace celui de 1988, vient renforcer la prise en compte de la démarche éthique.
La réflexion qui doit être conduite en amont de tout projet scientifique doit prendre en considération la règle dite des 3 R : Remplacer, Réduire, Raffiner. Remplacer l’utilisation des animaux par des méthodes alternatives validées dès que cela est possible, réduire le nombre d’animaux utilisés notamment grâce à des analyses biostatistiques adaptées, et raffiner les procédures en utilisant les meilleurs méthodes possibles. Les chercheurs ont le devoir d’avoir une approche prospective de la douleur et de mettre en œuvre des moyens adaptés pour la gérer. Il convient par exemple de choisir les meilleurs anesthésiques et antalgiques en fonction des procédures expérimentales, mais également d’ anticiper l’arrêt des procédures par le choix de « points limites » adaptés et suffisamment prédictifs.
Pour les établissements de petite taille, ces fonctions pourront être cumulées. L’organisation mise en place (fonctions, organigrammes, procédures d’informations, …) sera examinée lors des inspections, plus particulièrement lors de celle réalisée en vue de l’agrément des établissements.
Le nouveau dispositif a également renforcé le rôle du « vétérinaire désigné » dans chaque établissement d’élevage et de recherche. L’article 25 de la directive impose qu’un « vétérinaire désigné compétent en médecine des animaux de laboratoire » soit chargé, dans tout établissement éleveur ou utilisateur, de donner des conseils sur le bien‑être et le traitement des animaux. Certaines dérogations peuvent être prévues, notamment pour certaines espèces aquacoles pour lesquelles, le cas échéant, un expert ayant les qualifications requises peut remplacer un vétérinaire. Le dispositif français a bien sur repris intégralement ces mesures à l’article R. 214-102 du code rural et de la pêche maritime (CRPM).
Ce vétérinaire, désigné nominativement dans le dossier de demande d’agrément des établissements, est donc chargé de donner des conseils sur le bien-être et le traitement des animaux, notamment auprès de la « structure chargée du bien être des animaux » mentionnée à l’article R. 214-103 du CRPM. Cette structure, interne à l’établissement, est composée d’animaliers, présents au quotidien avec les animaux, et de chercheurs. Sans entrer dans le détail, cette structure n’a pas le même rôle que celui du comité d’éthique, mais c’est un rôle complémentaire qui se situe au fil de l’eau des procédures mises en œuvre. Ce rôle est défini à l’article 4 de l’arrêté du 1er février 2013 relatif à l’agrément des établissements. Il s’agit principalement de conseiller le personnel sur l’hébergement, les soins, de le conseiller sur l’application des exigences 3R, de vérifier le suivi du bien- être des animaux hébergés ou utilisés, de suivre l’évolution et les résultats des projets.
Cette structure doit rédiger des documents relatifs aux conseils donnés et aux relevés de ses décisions, ces documents étant à la disposition des inspecteurs.
Le vétérinaire a donc un rôle de conseil à jouer au sein de cette structure interne du bien-être animal, sans en faire partie stricto sensu, dans la mesure où, dans la plupart des cas, il ne fait pas partie du personnel de l’établissement mais il agit en tant que « consultant » externe. Dans d’autres cas, il peut faire partie des équipes de recherche, mais dans ce cas il doit conserver son regard « extérieur » afin de pouvoir donner un avis éclairé et impartial sur la conduite des animaleries de recherche ou de l’élevage.
Ce rôle consiste à donner des conseils d’une part, en matière de choix des traitements, qui doivent toutefois rester en cohérence avec les procédures expérimentales (interactions, résultats, biais...), et d’autre part pour ce qui concerne le bien-être des animaux tout au long de leur hébergement. Les avis et conseils doivent faire l’objet de traces écrites, documentées et étayées. La réglementation ne prévoit pas de fréquence pour ces visites ni de durée, cela dépend beaucoup de l’établissement et du nombre d’animaux. Il ne s’agit pas non plus de reprendre les éléments précisés dans nos rapports d’inspection, mais ceux-ci peuvent éclairer le contexte de l’établissement. Le vétérinaire désigné doit s’attacher à être précis et à apporter un éclairage propre à la médecine vétérinaire, plus particulièrement dans les établissements où la profession n’est pas représentée.
Se pose alors la question de la formation et de la compétence de ce vétérinaire, qui doit être selon les textes « compétent en médecine des animaux de laboratoire ». Cette compétence doit se décliner selon les différentes espèces animales qui peuvent être rencontrées et selon les procédures expérimentales très variées. Les dernières statistiques européennes montrent que plus de 80 % des animaux élevés et utilisés sont des rongeurs. De plus, beaucoup de souris sont des souches génétiquement modifiées, qui présentent des caractéristiques tout à fait particulières, avec ou non des phénotypes délétères.
Par ailleurs, les procédures expérimentales peuvent nécessiter des contraintes particulières, que le vétérinaire ne doit pas méconnaître pour ne pas interférer avec les résultats escomptés. Une réflexion en groupe de travail au sein de la commission européenne a été menée sur la formation et le maintien des compétences de tout le personnel en expérimentation animale, et la question des vétérinaires désignés a été abordée. Il en est ressorti les principes de base suivants : Les vétérinaires doivent suivre une formation initiale, puis une formation continue afin de maintenir cette compétence. La compétence des vétérinaires est reconnue en matière de santé et bien-être animal ; cependant, le domaine de la médecine des animaux de laboratoire est un domaine d’expertise pour lequel la formation initiale des étudiants vétérinaires ne peut pas être complète, ce qui nécessite donc un complément de formation. Cette formation spécifique pour ceux qui interviennent dans les établissements de recherche en tant que vétérinaire désigné (et non en tant que chercheurs eux-mêmes) devrait comporter des éléments sur le dispositif réglementaire (contexte national et européen) et sur les compétences fondamentales spécifiques à acquérir sur les principales espèces hébergées. Ce module de base pourrait être complété le cas échéant par des modules plus spécialisés sur certaines espèces (souris génétiquement modifiées), ainsi que par une formation continue.Il est important de savoir que l’arrêté du 1er février 2013 relatif à la formation et à la compétence des personnels dans les établissements de recherche précise qu’au titre de la formation continue, le personnel de ces établissements est tenu de suivre au moins 3 journées de formation sur 6 ans sur les aspects bien-être animal. Cette formation continue est bien sûr très largement ouverte selon différentes modalités, comme des conférences, des cours en ligne validés, des échanges entre collègues, des visites de sites.
Ce nouveau dispositif qui se met en place, doit permettre aux vétérinaires susceptibles de s’y impliquer de pouvoir accéder à une formation adaptée, de façon à remplir efficacement leurs nouvelles missions, dans le but de participer pleinement à l’amélioration des conditions d’hébergement des animaux utilisés à des fins scientifiques et des pratiques expérimentales.