Une scientifique du Centre de recherches sur la paléobiodiversité et les paléoenvironnements, (UMR 7207 du CNRS/Muséum national d’Histoire naturelle/Université Paris 6) et un confrère allemand du Leibniz Institute for Research on Evolution and Biodiversity de la Humboldt University à Berlin ont examiné les relations entre le développement des récifs et les changements du climat global entre -65,5 et -1,8 million d’années, en analysant une base de données contenant les caractéristiques de plus de 700 récifs fossiles. Ils ont ainsi pu démontrer que les écosystèmes récifaux n’ont pas le même type de comportement pendant les périodes à effet de serre et celles au cours desquelles le climat global est régi par les glaciations. Leur étude est publiée dans le volume 42 des Special Publications de l’International Association of Sedimentologists.
Les récifs, notamment les récifs coralliens, sont considérés comme particulièrement sensibles au changement climatique. A partir de la base de données PaleoReefs, cette étude a mis en relation la distribution des récifs au cours de la plus grande partie du Cénozoïque (de -65,5 à -1,8 million d'années) et les paléoclimats correspondant à cette ère géologique. Un accent particulier a été mis sur la transition climatique Oligocène-Miocène, qui correspond au passage du climat global à effet de serre à un climat régi par les glaciations.
Les résultats ont démontré que, jusqu’à -28 millions d’années, le développement des récifs à l’échelle planétaire était dépendant de la température moyenne de l’eau de mer : pendant la période à effet de serre, c'est le climat qui le contrôle en majeure partie. Après -28 millions d’années, lorsque les concentrations en CO2 de l’atmosphère sont déjà relativement basses et que les conditions de glaciation prévalent, ce lien disparaît. Le développement des récifs dépend alors de l'adaptation des écosystèmes à de nouvelles conditions océanographiques. En parallèle avec le refroidissement de la planète, la production carbonatée des récifs augmente et ceux-ci colonisent de nouvelles latitudes. Pour expliquer ce phénomène, les chercheurs émettent l'hypothèse que des changements dans la paléocirculation océanique globale ont conduit à une réduction de la remontée d'eau équatoriale, ce qui a eu pour effet d'augmenter les surfaces des eaux pauvres en nutriments qui favorisent la croissance des récifs coralliens tropicaux.
Référence : Latitudinal trends in Oligo-Miocene reef patterns and their relationship to climate. Evolution of carbonate Systems during the Oligo-Miocene climatic Transition, Special publication Number 42 of the International Association of Sedimentologists, 2010, p. 17-34. Christine Perrin & Wolfgang Kiessling.