Alors que la demande flambe pour le saumon, pour le plus grand bénéfice des producteurs, l'offre peine à suivre. Conséquence: les prix grimpent en flèche ces derniers mois et pourraient atteindre des records d'ici Noël.
Encouragés par les nutritionnistes (en Europe et aux Etats-Unis) et l'augmentation du niveau de vie (en Chine, au Mexique, au Brésil), la consommation de poisson touche particulièrement le saumon. Or, ni la pêche ni la pisciculture ne suffisent à répondre à la demande.
Du coup, les prix flambent. Plafonnant entre 11 et 12 dollars depuis 2010, le kilo de saumon est passé entre mars et juillet à 18 dollars. Les coûts de production n'ayant pas augmenté, les spécialistes de la pisciculture (qui fournissent 90% du marché) engrangent des bénéfices records.
C'est ainsi que Marine Harvest, géant norvégien de l'aquaculture et leader mondial de l'élevage de saumon (20 % du marché), a qualifié ses résultats trimestriels parus voici quelques jours d'historiques.
Au 2e trimestre 2013, le bénéfice opérationnel a atteint 901 millions de couronnes norvégiennes (136 millions de francs), soit quatre fois plus qu'au 2e trimestre 2012. Le chiffre d'affaires 2012 (près de 2,5 milliards de francs) devrait être très largement dépassé cette année.
Pas d'investissements majeurs pourtant à l'origine de ces profits en hausse: Marine Harvest n'a vendu que 80'000 tonnes de saumon entre avril et juin de cette année, alors que 99'000 tonnes avaient été écoulées d'avril à juin 2012.
Pis encore, l'entreprise a d'ores et déjà annoncé un volume prévisionnel de production en baisse pour 2013 à 335'000 tonnes, à comparer aux 400'000 tonnes en 2012... tout en s'attendant à une croissance à deux chiffres pour ses résultats.
Voici quelques semaines, la firme a revu ses implantations, fermant plusieurs sites à travers le monde, dont une usine de transformation en Bretagne, suscitant la surprise et l'incompréhension chez ses salariés.
Si une légère baisse des prix est attendue à l'automne, notamment avec l'arrivée sur le marché des stocks de saumon élevés pour être commercialisés en période de fêtes, c'est surtout l'ouverture de nouveaux sites de production qui pourrait réduire les tensions.
Après le saumon d'Ecosse et le saumon de Norvège, devraient arriver sur le marché de gros volumes de saumon d'Argentine et surtout du Chili. Dans les eaux froides de la Patagonie et de la Terre de Feu, plusieurs projets d'ampleur devraient arriver à maturité et alimenter le marché dès cet automne.
Le saumon n'est pas une nouveauté au Chili. Mais, dans ce pays (2e producteur mondial depuis quelques années), une grave épizootie avait mis à mal la filière entre 2007 et 2009, Le retour des poissons chiliens avait provoqué, au printemps 2011, une brutale chute des cours (de 15 à 10 dollars le kilo).
L'impact devrait surtout se faire sentir en 2014. Pour 2013, un rapport de la FAO, l'organisation pour l'alimentation et l'agriculture des Nations unies (ONU), la production mondiale de saumon d'élevage devrait stagner autour des 2 millions de tonnes (dont plus de la moitié en Norvège).
Devant la raréfaction des ressources naturelles et du poisson sauvage, l'élevage est devenue la seule solution pour alimenter les marchés mondiaux et répondre à la demande croissante de saumon.
Pourtant, les réticences sont nombreuses: partout à travers le monde, les projets de nouvelles piscicultures font face à des oppositions, comme en Nouvelle-Zélande.
En Europe, les marchés sont très liés à la production norvégienne. Les prix élevés constatés depuis le printemps ont, pour le moment, été atténués par la distribution. Mais ne sont pas encore répercutés aux consommateurs finaux, mais ils menacent l'ensemble des filières de transformation.